
Très bonne émission sur la conciliation allaitement et travail jeudi dernier sur Les Maternelles. Et je ne dis pas cela seulement parce que notre robe d'allaitement rayée va super bien à Nadia Daam, la chroniqueuse web, et que cette dernière, mannequin d'un jour pour mamaNANA (!) a présenté avec humour et brio le sac avec compartiment isotherme City Style et les coussinets invisibles et hyper absorbants que nous proposons(ne ratez pas sa chronique en fin d'émission, ce n'est pas souvent qu'une journaliste télé montre les avantages d'une robe d'allaitement!)
Je le dis car l’émission avait à la fois de bons témoignages, une excellente experte (Véronique Darmangeat, qui réussit toujours à impartir le maximum d’information dans le minimum de temps, tout en restant hyper claire – un talent dont je suis jalouse), et surtout un bon équilibre entre dire «oui c’est possible de concilier les deux» et «mais attention vous pouvez avoir des difficultés, voici comment les surmonter.» Si vous vous posez la question de continuer l’allaitement après la reprise du travail, c’est une émission à ne pas manquer. Demandez aussi à votre nounou, mari, belle-mère, ou toute autre personne qui vous accompagnera lors de ce projet de la regarder également !
A visionner en suivant ce lien:
http://les-maternelles.france5.fr/?page=emission&id_rubrique=4016
Il y a des moments dans cette émission qui m’ont tout particulièrement interpellée : d’une part quand Audrey, la jeune femme qui avait avec succès concilié les deux, a dit «J’ai voulu avoir tout: allaiter, reprendre mon boulot, être bien avec mon bébé». Finalement, le cœur du sujet il est là : les femmes veulent tout avoir et ne pas s’entendre dire que «Oh désolé Madame, vous avez fait le choix de travailler, donc votre bébé va forcément être sevré».
Et d’autre part, quand elle a dit «Concilier travail et allaitement, cela m’a évité de prendre un congé parental.» Je ne vais pas me positionner ici sur le débat, «Est-ce mieux pas de prendre un congé parental ?», car on y serait encore dans quinze jours, mais sur l’importance de cette petite phrase pour un employeur : encourager et faciliter la reprise du travail après un congé de maternité, cela passe aussi par un accueil informé des mamans qui veulent concilier allaitement et travail. Ces employeurs qui se plaignent parfois que les femmes sont trop nombreuses à disparaître en congé parental pour ne jamais revenir devraient en prendre de la graine.
Autre phrase qui m’a marquée, ce que Véronique Darmangeat a conseillé de faire quand on rentre de congé de maternité et qu’on veut tirer son lait au travail : «Il ne faut pas demander la permission. Il faut dire, voilà, je veux continuer à allaiter mon bébé, j’ai besoin de tirer mon lait deux fois par jour, j’ai besoin d’un endroit pour le faire.» Ah ne pas s’excuser, ne pas demander la permission. Pas facile. Je l’ai vécu : déjà, quand on rentre de congé de maternité, et qu’on a l’impression d’avoir «laissé tomber tout le monde» pendant plusieurs mois, on culpabilise un peu.. Surtout si votre patron ou collègues vous rappellent plus ou moins gentiment tout ce qu’ils ont dû faire pour vous remplacer et gérer l’interim. On a envie de se faufiler discrètement et de montrer vite vite qu’on est aussi productive qu’avant. Comme si on devait s’excuser d’avoir eu un enfant. L’ironie de la chose c’est que notre cher pays, et ces chers collègues si critiques, ont bien besoin que les femme fassent des enfants : ce sont ces enfants qui vont payer les futures retraites, c'est votre fille la future chirurgienne qui sauvera votre patron quand il aura son infarctus dans 30 ans …. Mais on nous fait souvent sentir que ce fameux congé de maternité, c’est une faveur qu’on nous fait.
Pas facile de faire respecter ses droits, et de s’affirmer en tant que collaboratrice de l’entreprise (ou du service public) ET mère… C’est là que ce serait bien d’avoir l’appui des médecins du travail, des PMIs, des autres acteurs institutionnels (syndicats ?) Sur un sujet comme celui-ci, on aimerait bien ne pas être toute seule pour faire valoir ses droits. Sans compter que certains de ces acteurs qui devraient vous faciliter la tâche (comme les crèches municipales) sont parfois ceux qui vous mettent des bâtons dans les roues. Je trouve ahurissant par exemple qu’une crèche ose refuser le lait maternel, mais cela arrive fréquemment. C’est un domaine sur lequel il faudra légiférer, car comment expliquer qu’une mère parisienne puisse laisser du lait tiré à son bébé gardé en crèche (puisque la ville de Paris a une directive dans ce sens) mais pas la mère dont l’enfant est gardé dans une ville de proche banlieue (par exemple) ?
Aux Etats-Unis il existe des lettres-type qu'un hôpital ou médecin peut envoyer à l'employeur d'une mère qui veut concilier travail et allaitement et qui expliquent les avantages d’un tel choix pour l’employeur, et les modalités à mettre en place. Voici un exemple. Une idée intéressante (si la maman est demandeuse d'un tel soutien bien sûr) car il est parfois plus facile de discuter de ces sujets avec son employeur si un tier "officiel" a abordé le sujet d'abord - merci à la page Facebook de Lactissima pour ce lien.
J'ai apprécié que d'autres journalistes se soient récemment penchés sur le difficile sujet du retour au
travail. J’ai déjà parlé de l’excellent livre Maman Travaille de Marlène Schiappa. Et tout récemment, le magazine Parents (numéro de novembre 2011), a fait un très bon dossier sur la reprise du travail (avec en prime un petit encart sur la conciliation travail et allaitement) que je vous conseille de lire. J’ai particulièrement apprécié le fait que le magazine ne reflète pas une vue trop bisounours de cette étape – notamment avec le témoignage à la fois, profond, poignant et drôle de Daphné Burki, l’inénarrable animatrice des Maternelles, qui a concilié dans, des circonstances pas évidentes, travail et allaitement. Voir ci-joint (cliquez sur l'image pour agrandir).
Je crois aussi qu’on n’est qu’au début du débat sur la conciliation allaitement et travail. Avec les taux d’allaitement en augmentation constante, et les taux d’activité des femmes qui ne vont pas en diminuant, la question de la conciliation va se poser pour de plus en plus de femmes. Et j’ai comme l’impression que les employeurs (entreprises, secteur public, et autre) sont un peu en retard sur ce sujet-là !
Récemment Philips Avent et l’Institut des Mamans ont publié une très intéressante étude sur l’allaitement en France. Les chiffres datent de juillet 2011, et l’étude a été publiée en octobre 2011, c’est donc tout récent. Pour cette étude l’Institut des Mamans a interrogé 600 mères ayant un enfant de moins d’un an. La bonne nouvelle, je trouve, c’est que l’étude confirme la tendance à la hausse des taux d’allaitement : l’étude montre que 70% des mères interrogées ont tenté l’expérience de l’allaitement au sein. C’est un chiffre très proche de celui de l’enquête périnatale 2010 qui vient d’être publiée : cette enquête montre que 60% des femmes font le choix de l’allaitement exclusif, et 9% le choix de l’allaitement mixte, donc 69% au total font l’expérience de l’allaitement maternel. Il y a du progrès depuis le 41% de taux d’allaitement de 1986.
Au niveau des durées d’allaitement, l’étude Philips Avent/Institut des Mamans montre clairement l’impact de la reprise du travail sur les durées d’allaitement avec une chute nette du taux d’allaitement entre le 2ème mois et le 3ème mois: la reprise du travail, souvent à 10 semaines pour les mamans dont c’est le premier bébé, est passée par là. 41% des mères actives interrogées ont cité la reprise du travail comme le facteur décisif du sevrage.
A ce niveau on peut se positionner sur deux choses : un congé de maternité plus long et/ou une facilitation de la conciliation allaitement ou travail. Je pense qu’il faut se battre sur les deux, mais que le congé de maternité plus long sera probablement plus difficile à obtenir (nous l’avons vu récemment avec le rejet par la France et d'autres pays de la recommandation européenne sur ce sujet.)
La conciliation travail & allaitement, cela ne me parait pas si difficile à mettre en place si les différents acteurs y mettaient un peu du leur. Bien sûr c’est plus facile pour une grande entreprise qu’une toute petite de mettre en place en local dédié à l’allaitement (pour que les femmes tirent leur lait), et il y a des métiers où s’interrompre ainsi peut être vraiment difficile (je pense notamment au personnel navigant des compagnies aériennes), mais dans la grande majorité des cas, les aménagements sont minimes. Quant à la question de l’argent, tiens, parlons-en. L’heure prévue par la loi pour l’allaitement n’est pas forcément rémunérée (cela dépend de la convention collective) – ce que je trouve un peu mesquin tout de même – surtout quand on voit les avantages pour la Sécurité Sociale des bébés allaités (moins de maladie, etc.) A l'employeur qui dit « ouh vous n'y pensez pas, rémunérer cette heure perdue on y perdrait trop», on pourrait dire «Vous préférez quoi : une mère stressée par un sevrage précoce et qui vient au bureau à reculon ? Une mère plus souvent absente pour cause d'enfant malade? Une mère qui prend un congé parental qui recule la reprise du travail ? Ou un congé de maternité d’un an aux frais de la princesse comme en Suède ? Hmmm ? »
Et vous, qu’en pensez-vous ?