Bon, le titre de ce billet n’est pas vraiment un appel à la lecture mais il traduit assez bien mon sentiment. Je ne sais pas si comme moi vous vous êtes précipitée devant le petit écran hier soir à l’annonce de la diffusion du film « Un heureux évènement » ; j’ai alors vécu une petite descente au pays de la déprime, du fond de mon canapé, gavée de chocolats, en me demandant si ce film n’était pas en fait une grosse pub pour la contraception…
Je ne dis pas que c’est un mauvais film; les acteurs sont très bons, les dialogues également, mais le tout n’est vraiment pas optimiste. Certes, la maternité n’est pas toujours « un moment de plénitude hyper facile à vivre », mais ce qui me gêne un petit peu dans ce cas, c’est que l’histoire (tirée du roman éponyme d’Eliette Abécassis), montre surtout les côtés négatifs de la maternité, et la dérive d'une jeune maman mal entourée, qui se cherche, et qui a eu un enfant avec un véritable goujat (ce qui s’arrange finalement dans le dernier quart d’heure, ouf), et très peu les recours qu'elle aurait pu trouver.
Je ne ferai pas ici une critique détaillée, intelligente et organisée du film (si vous croyez que j’ai pensé à prendre des notes !), mais je m’intéresserai surtout à la façon dont l’allaitement y est traité.
D’abord, j’aimerais insister sur le fait que les associations de soutien à l’allaitement (incarnées par un maléfique et sectaire « club du lait » dans le film) ne sont pas de sombres organisations malsaines ! On retrouve ce sentiment dans les répliques de Josiane Balasko (incarnant la maman un peu bohême et aigrie de l’actrice principale), et lors d’une réunion inquiétante où l’on stigmatise les mères allaitantes, qui passent pour des manipulatrices intransigeantes sur le cosleeping et le portage en écharpe. Le personnage principal, jeune femme intello mais coquette et sexy (Louise Bourgoin, tout de même !), dépoussière d’ailleurs un peu l’image de l’allaitement par une madone sacrée et qui semble adorer sacrifier sa vie sociale pour sa progéniture. Une réplique la fait clamer qu’allaiter sa petite fille (9 mois, je suis contente que cela change un peu des 2 mois si courants en France) lui apporte plénitude et satisfaction, mais elle ne renonce pas pour autant à son envie de sortir entre amies se changer les idées en se saoulant.
On y voit aussi comment le père (macho/ obtus/ un peu ordure sur les bords) utilise l’allaitement pour se décharger de tous ses devoirs, avec cette réplique aussi blessante que facile : « tiens, elle veut le sein de sa mère ! », montrant bien la difficulté pour certains hommes de comprendre la relation si particulière entre un bébé et sa mère, lorsque celle-ci doit mettre son corps en partie à disposition du nouveau-né pour pouvoir l’allaiter. On voit comme l'allaitement au sein peut être un combat pour certaines femmes, contre leur mère, leur belle-mère (qui ici tentent en douce de fourguer des biberons au bébé à la moindre occasion). La scène la plus touchante (selon moi) arrive à la fin, lorsque qu'une goutte de lait perle au sein de la maman, qui a dû se séparer de sa fille pour quelques temps afin de se retrouver. Les larmes, les regards mélancoliques et les nuits sans sommeil, pourront tenter de montrer le sentiment de manque qu'une mère peut avoir pour son enfant, mais j'ai trouvé que rien n'était plus fort que ce témoignage, pourtant un peu animal, très silencieux, de la douleur de la séparation (même lorsqu'elle est nécessaire).
J’ai vu en revanche de très belles scènes d’allaitement, une démonstration assez réaliste d’un accouchement en maternité, et de la dépossession de leur corps que certaines femmes peuvent ressentir à ce moment-là (dans le film, une douzaine d’internes examinent l'entrejambe de la primipare, et un kiné lui demande de servir d’exemple devant ses élèves pour son cours sur la rééducation du périnée…).
Bref, la vision de ce long-métrage m'a laissé dans un état doux-amer mêlant inquiétude, soulagement et hébétude. Une fois ma colère due à la caricature des mamans "maternantes" passée, je me suis jurée d'interdire ce film à toutes mes connaissances nullipares, sous peine de faire chuter le taux de natalité de mon entourage. J'ai trouvé beaucoup de limites à ce tableau un peu surjoué du blues maternel et attends plus que jamais l'adaptation d'un autre récit sur le bouleversement de la naissance qui m'a semblé bien plus complet: Un miracle en équilibre de Lucia Etxebarria.
Et vous, qu'en avez-vous pensé? Quelles sont vos oeuvres favorites sur l'arrivée d'un "heureux évènement"?